vendredi 28 juin 2013

Les prix algorithmiques : à chaque client son prix?   

On connait depuis longtemps le "yield managment" qui vise l'optimisation des taux de remplissage en se basant sur la notion de temps (évolution des prix en fonction de la demande sur une durée donnée). Cela explique par exemple qu'un billet SNCF acheté une semaine avant le départ coûtera plus cher que le billet acheté 2 mois à l'avance, ou qu’un billet acheté en dernière minute soit bradé… 

La nouveauté, c'est que l'on commence à voir arriver, aux Etats-Unis notamment, des formes étendues et plus pernicieuses du yield management : les prix algorithmiques - des prix qui varient d’un acheteur à l’autre en fonction du profil client, du moment, du lieu ou du mode d’achat.

  • La formation des prix algorithmiques se base sur des critères douteux

Les critères peuvent porter sur la confrontation de l'offre et de la demande, sur la nouveauté ou l'ancienneté du produit: si c'est un bien standardisé ou bien s’il s'agit d'un bien innovant, ou encore selon les caractéristiques de l'acheteur. Le prix sera différent si l'on est jeune ou âgé, si l'on utilise un PC, un Ipad ou un mobile pour se connecter, si l'on est fidèle à l'enseigne ou pas, si l'on a un revenu élevé ou pas …. 

  • Les prix algorithmiques s'appliquent à des biens matériels

A la différence du yield management souvent appliqué dans le milieu des transports, les prix algorithmiques s'appliquent à des biens matériels dont la valeur est beaucoup plus tangible.
A titre d'exemple, Amazon et le distributeur américain Stapples utiliseraient de telles méthodes depuis plusieurs années déjà sur des biens de consommation courante. 

Le Wall Street Journal a testé plus de 1000 produits sélectionnés au hasard à partir de 10 codes postaux sur le site de Staples. Le résultat? Près d'un tiers des produits étaient affichés avec des prix différents. Les variations de prix entre les prix les plus élevés et les prix les moins élevés sur un même produit sont de  8% en moyenne selon le journal. 
Pour ces 5 produits, les différences de prix sont criantes: 10,5% sur l'agrafeuse, 9,6% pour le stylo, 10,3% pour le scotch et 9,1% sur le coffre. Source: Wall Street Journal.

  • Les prix algorithmiques: une atteinte aux libertés individuelles?

Le problème réside dans l'opacité qui entoure les données utilisées et la manière dont elles sont croisées. 
Est-il acceptable pour l'acheteur de payer plus cher son imprimante s’il effectue son achat au travail plutôt que sur son Ipad chez lui installé dans son canapé? Est-il compréhensible de payer un produit plus cher si l'on habite dans un quartier bourgeois que si l'on réside dans un quartier modeste? 
Le consommateur peut-il consentir à payer un produit dont le prix varie, à priori, sans raison "valable"? Et surtout, est-il possible pour le consommateur de ne pas être ciblé ? La question de la préservation des libertés individuelles reste posée. Il faut dire que pour l'instant, les prix algorithmiques s'apparentent un peu à un Big Brother jouant avec les portefeuilles, et ce, dans la plus grande ignorance et incompréhension des individus!

  • Les prix algorithmiques: un destructeur de relation client?

D'un point de vue client, les prix algorithmiques paraissent obscurs. Pour quelle raison vais-je acheter ma cafetière plus chère que mon voisin? Comment l'enseigne peut elle le justifier un prix fixé à "la tête du client" dans l'optique de la relation client?
Avec les prix algorithmiques, nous sommes bien loin des critères de transparence et de sincérité de la relation plébiscitée et attendue par les clients vis-à-vis des enseignes... Et cela risque surtout de favoriser un retournement des clients contre les enseignes. 


Les prix algorithmiques?
C’est en fait un tue l’amour, un destructeur de confiance, une pratique d’un cynisme qui, du moins dans un monde latin attaché aux notions d’équité et d’égalité de traitement, provoquerait la fureur des clients (et des associations de consommateurs).

lundi 24 juin 2013

SAGA CROSSCANAL. Episode 5

Quelle cohérence des pratiques commerciales?   


"Je souhaitais acheter un téléphone fixe pour mon domicile. J’avais repéré un modèle sur le site de Darty. Je suis passée en magasin mais ils étaient en rupture de stock. Je suis donc retourné sur leur site internet où j'ai pu acheter mon téléphone."

Ce verbatim traduit-il le désir des consommateurs de retrouver exactement les mêmes produits, les mêmes offres au même prix partout? Surement pas! Le véritable enjeu n'est pas tant de proposer la même offre partout et à tout le monde comme le voudrait l'idéal "ATAWAD*", que de privilégier la cohérence dans son offre (prix, services, promotions, utilisations de la carte de fidélité…) et la transparence de la communication vis-à-vis des clients.

  • Des pratiques commerciales incohérentes face aux parcours d'achat crosscanal des consommateurs


Un tiers des enseignes proposent le même assortiment en magasin et sur internet, un tiers un assortiment plus étendu en magasin, et un tiers (seulement) plus large sur internet. Il est donc courant que le client soit confronté à une offre en magasin différente de celle qu'il a précédemment vu sur internet. Si elle n’est pas expliquée, cette mauvaise surprise peut frustrer le consommateur.
Avec deux offres différentes pour une même enseigne, les clients peuvent avoir le sentiment qu'il s'agit de deux marchés parallèles. Le client risque alors de se demander quel est le canal de référence. 

En devenant crosscanal, les parcours d'achat se heurtent à des incohérences flagrantes entre le online et le offline. Ces différentiels d'offre renforcent l’incompréhension, voire pour certains créent de la suspicion vis-à-vis de l’enseigne. Autant de facteurs qui influencent négativement la fragile mais ô combien précieuse confiance du consommateur envers l’enseigne.

Alors comment éviter la mauvaise surprise du client?

  • La transparence: recette d'une cohérence réussie


Une solution : la transparence! Le principe est somme toute banal mais il est peu souvent appliqué. Il s'agit d'expliciter le plus clairement quelle promotion vaut sur internet et laquelle vaut en magasin ou quel produit est disponible en ligne mais pas en magasin etc. la liste est longue! En clair, il faut permettre au client de savoir ce qu'il va trouver d'un côté et de l'autre de son écran. 

Il ne faut pas sous estimer le client. Il peut tout à fait comprendre que l'offre soit plus large sur internet ou qu'un produit soit moins cher sur internet qu'en magasin. La meilleure façon d'anticiper ses potentielles mais légitimes frustrations est d'informer le client. L'en informer est une première réponse à l'attente basique d'information.
L’assumer est aussi une preuve de transparence : il faut alors clairement établir les règles et les conditions d’alignement (ou de non-alignement) des prix magasins sur ceux du web, informer et former les vendeurs. 

Si ces écarts de prix restent un écueil et un véritable casse-tête pour nombre d’enseignes confrontées à une concurrence rude On-Line & Off-Line, des moyens simples existent pour en limiter les effets néfastes et fragiliser inutilement la relation client (ou la confiance des clients dans l’enseigne). 


* ATAWAD acronyme de la devise "Any Time, Any Where, Any Device": C'est le fait d'avoir tous les produits quelque soit le moment, le lieu ou le canal emprunté. 



jeudi 20 juin 2013

 E-shopping: Decide.com, pour acheter le meilleur produit au meilleur prix   

En début de semaine, nous vous présentions deux applis françaises de webrooming prometteuses, Mappy et Socloz, qui se positionnent en tant qu’assistants shopping de proximité. Outre atlantique, c’est decide.com qui a retenu notre attention. Cette appli ne se contente pas de vous trouver sur le web (mais pas en magasin) le produit que vous cherchez, elle vous garantit de faire le meilleur achat – quitte à proposer un autre produit - au meilleur moment pour obtenir le meilleur prix.


Une approche scientifique pour vous aider à faire le meilleur choix

Decide.com a été créé par des pros de la statistique, qui ont développé des algorithmes analysant des milliards de prix sur le web, des millions d’avis de consommateurs et des commentaires et essais produits de milliers de professionnels. Au final, le site propose deux indicateurs d'aide à la décision d’achat véritablement innovants :

Le score d’intérêt produit
Pour les 4 grandes catégories de produits traitées (électronique, électroménager, maison & jardin, puériculture), l'application affiche une note sur 100 pour indiquer si le produit choisi constitue un « bon achat ». Sur un produit avec une note tout juste moyenne, on vous dit que "vous pouvez trouver mieux" comparé à d’autres produits mieux notés. Et vous êtes même informé si le produit est une fin de série et qu’il vaut mieux attendre quelques semaines pour acheter la nouvelle version.

L'indicateur prix
Bien sûr, decide.com trouve les meilleurs prix sur le net. Mais beaucoup plus fort, le site affiche les probabilités d'augmentation ou de réduction du prix du produit dans les semaines qui viennent, avec un indice de confiance, grâce à son modèle prédictif. Ainsi, le site émet des recommandations du type « Nous aimons ce produit, mais attendez quelques semaines pour l’acheter 35$ moins cher (indice de confiance de 82%)». En moyenne, le site annonce que ses prédictions de hausse ou baisse de prix sont fiables à 77% et permettent d’économiser 101$ en moyenne. Et pour montrer sa confiance dans ses statistiques, decide.com s'engage à vous rembourser le différentiel de prix si vous trouver le même produit moins cher ailleurs dans les deux semaines qui ont suivi l'achat. Cette garantie est cependant payante. 

L’avantage de cette appli est double pour le consommateur : un gain de temps indéniable et une réassurance forte de faire le bon achat au meilleur prix grâce à la dimension scientifique des recommandations. Bien sûr, le site ne peut fonctionner que sur des produits qu’équipement largement diffusés, et ne compare que les produits disponibles sur le web, mais le bénéfice client semble réel. A condition que les recommandations ne soient pas biaisées par le fait que le site se rémunère sur les clics et les achats des produits recommandés. Peu de risque à notre avis, le site perdrait alors toute la crédibilité qui fait la force de son modèle.

L'approche scientifique est séduisante par son côté rigoureux et exhaustif mais au final le niveau de satisfaction des utilisateurs sera le seul juge de paix!

lundi 17 juin 2013

Webrooming: la contre attaque face au showrooming ?  

Après le showrooming - qui consiste, au grand dam des enseignes, à manipuler et regarder des produits en magasin, comparer en même temps les prix sur son smartphone et faire ensuite son achat en ligne - une nouvelle tendance se dessine aujourd'hui: le webrooming. Sorte de showrooming inversé, cette application web permet de localiser les points de vente qui proposent les produits que l’on recherche avant d'aller les acheter en magasin. Plus besoin de visiter 10 sites différents pour trouver le bon produit à proximité. Deux initiatives récentes ont retenu notre attention, celles de Mappy et Socloz.

Start-up sortie des cartons en 2010, Socloz se présente comme un assistant shopping. Il permet de visualiser sur une carte les magasins proposant le produit recherché, indique les horaires d’ouverture et les promotions, et permet de vérifier la disponibilité du produit et même de le réserver. Ce site annonce déjà plus d'1,3 millions de produits recensés et 9000 magasins partenaires. Reste à rendre cette appli disponible sur mobile, on s'étonne que ce ne soit pas déjà le cas. Socloz prévoit de faire payer les enseignes pour chaque client qui achète un produit du magasin à partir d'une réservation sur son site. Et oui, il y a des pure players qui assoient leur business model sur la réalité du chiffre d’affaires !

De son côté, Mappy annonce pour le courant de l'été la sortie d'une appli web-to-store enrichie. Comme pour Socloz, on trouvera facilement les magasins près de chez soi qui proposent le produit recherché avec, pour les enseignes qui fournissent les infos, un affichage de la disponibilité des modèles, des tailles, des couleurs… 
Si Mappy ne parle pas encore de service de réservation, le coté showroom sera particulièrement mis en avant : l'appli montrera la photo de la devanture des magasins sélectionnés – exactement comme Google Street - et pour les enseignes qui l'acceptent, plusieurs prises de vue de l'intérieur du magasin, histoire de mettre le client directement en situation d’achat. Voilà une exploitation futée du cœur de métier du site, la cartographie, alliée à la géolocalisation.

Ces acteurs sont ils promis à un bel avenir ?

Si le concept est séduisant par son côté pratique d’agrégateur d’offre, on peut se demander s’il répond à un besoin client suffisamment fort et récurrent. Si vous recherchez tel modèle d’appareil photo numérique, ou une robe rouge pour aller avec vos dernières chaussures, ou encore un cadeau de naissance pour une petite fille, alors ces sites vous aideront sûrement. Mais ces scénarios d’achat restent peu fréquents comparés à une recherche par marque ou enseigne, dans quel cas on recherchera sur le site de la marque ou de l’enseigne. 

De plus, ces applis devront délivrer une expérience client à la hauteur de leur promesse. Il faudra pour cela allier au moins 4 critères :
  • Un grand nombre d’enseignes recensées pour assurer la largeur de l’offre,
  • La capacité à gérer des nomenclatures "produits" par définition hétérogènes entre enseignes pour que les résultats de la recherche soient à la fois complets et pertinents,
  • Une grande fiabilité dans la disponibilité affichée des produits. Quid des magasins de quartiers dont les stocks ne sont pas, et ne seront jamais, informatisés ?
  • L’équité entre les réponses proposées. Sur ce point, Mappy proposera aux enseignes de payer pour ressortir en priorité dans les résultats de la recherche. Le risque est alors de proposer un résultat qui ne colle pas vraiment au produit recherché. Pas sûr que cela plaise aux utilisateurs.
Amis lecteurs, testez donc ces sites et dites nous ce que vous en pensez !


mercredi 12 juin 2013

L'internet mobile: un canal à double face?   


Le mobile connecté annonce de multiples perspectives dans les stratégies crosscanal des enseignes: accompagnement du parcours client dans un espace autre que le site web ou le magasin, proposition d'offres différenciées, géolocalisation… Néanmoins, des enjeux inédits apparaissent: showrooming, incohérences flagrantes… Comment les distributeurs peuvent-ils s'adapter?

  • La mobilité: une caractéristique qui fait trembler les distributeurs


Le Smartphone a complètement changé la donne. Utilisable n'importe où et n'importe quand, il fait sauter la distance entre le site web consulté sur un ordinateur et le magasin physique. L'accès au site web peut se faire directement au sein de l'enseigne. Cette proximité met alors en avant les incohérences entre le site et le magasin. Si un différentiel (non explicité) d'offre promotionnelle apparait entre le "online" et le "offline", la contradiction sautera aux yeux du client et risque de dégrader l'image de la marque.

Autre impact redouté de cette mobilité: le showrooming*. Selon une récente étude de Google/Ipsos, 18% des mobinautes déclarent avoir changé d'avis à propos de l'achat d'un produit ou d'un service en magasin après avoir consulté des informations sur leurs Smartphones. Utiliser comme un outil d'achat au sein même du magasin, le Smartphone sert désormais à comparer les prix et produits des concurrents du magasin dans lequel on se trouve. 

  • Transformer la contrainte de l'internet mobile en opportunité


Il n'y a pas de fatalité concernant les retombées négatives de l'internet mobile! Des alternatives existent, comme la dynamisation de l'offre et une utilisation intelligente d'internet. 
La démarcation de l'offre en magasin ou sur appli mobile peut emprunter différents visages: produits de substitution, système de click & collect au sein de la boutique, visibilité accrue des stocks, proposition de produits propres à la marque issus de sa R&D (comme le fait Décathlon par exemple). Alors oui: l'enseigne peut proposer une offre différenciante contrebalançant les effets de la mobilité!

Autre piste de réflexion: plutôt que de voir l'internet mobile comme un épouvantail, il serait plus judicieux pour une enseigne de l'utiliser à son avantage.

Les mesures farfelues comme celle de l'épicerie australienne Celiac, qui a fait payer une sorte de droit d'entrée aux clients entrants dans le magasin, sont évidemment à bannir. Au contraire, invitez internet dans le magasin! 
La mise en place du wifi en magasin évitera au client de sortir pour se connecter, des bornes connectées permettront d'agrandir l'offre et les informations disponibles, des codes barres révélants les commentaires des internautes pourront aussi apporter des renseignements recherchés sur internet. 

La finalité de ces dispositions? Apporter de l'information, que les clients vont aller de toute façon chercher sur leur Smartphone, dans vos propres canaux.

Chaque canal doit apporter une valeur ajoutée: une simple copie du site web en magasin est inutile.

Mais avant d'envisager des actions, l'utilisation des mobiles en magasin est à relativiser: ils peuvent aussi servir à prendre de simples photos ou bien envoyer des sms! 


* Le showrooming consiste à scanner des produits en magasin pour les comparer aux prix proposés dans d'autres enseignes. Le but? Trouver le produit le moins cher pour arbitrer son choix d'achat.



lundi 10 juin 2013

Pixmania : à quoi servent les pure players ?    


L'agonie de Pixmania est un terrible gâchis, avant tout humain. C'est aussi un moment emblématique, comme l'a été la chute de Lehman Brothers: il servira de repère pour marquer symboliquement la fin de l'ère des pure players.
L'annonce, la même semaine, de l'arrêt de la vente de gros électro-ménager par Amazon, spectaculaire victoire de Darty contre les pure players, est venue enfoncer le clou.

Certains annoncent la mort des pure players avec autant d'aplomb qu'ils annoncaient leur triomphe voici 10 ans. D'autres font remarquer qu'Amazon ou Venteprivée restent incroyablement performants. De fait, quand on fait +25% à 20 mios € de CA, c'est qu'on est malin. Quand on fait toujours +25% au-delà du premier millard, c'est que le monde a changé…

La réponse est simple, en réalité : les pure players réussiront s'ils servent à quelque chose. Comme n'importe quelle entreprise.

À quoi servent-ils ? Quelles valeurs ajoutées apportent-ils au marché que ne pourrait apporter un retailer click & mortar ? Pour beaucoup de pure players, la réponse est "pas grand chose" : ceux-là sont déjà en train de mourir, ou de se vendre à des enseignes physiques.
D'autres à l'inverse ont su exploiter le Net, sa puissance, son interactivité, son instantanéité, pour inventer des business models convaincants.

Souvent, ils ont su actualiser de vieilles recettes : Groupon, ce n'est jamais que des coupons ; eBay ou Le bon coin sont la version moderne des petites annonces ; et les ventes privées existent depuis toujours. Mais ces acteurs ont su utiliser les potentiels du Net pour donner à ces modes de vente une puissance infiniment plus grande. 

Ces business models ne sont en rien la transposition online de réseaux physiques : avoir des magasins ne rend pas plus facile leur développement, bien au contraire. Ces pure players là ont de l'avenir, parce qu'ils sont utiles, ils enrichissent le marché.

Il y a des contre-exemples apparents : Zappos ou Cdiscount ne sont pas des business models originaux, juste de très bon e-commerçants. Pourquoi un retailer physique ne pourrait-il pas faire encore mieux ? 
Zappos rappelle que dans certains secteurs, le retail en magasin est déficient : rien de plus frustrant que d'acheter des chaussures, nous le savons tous en tant que clients. A tel point qu'on finit par acheter en ligne le produit qui, entre tous, devrait justifier un essai ! Quant à Cdiscount, il a sans doute aujourd'hui atteint une taille critique lui permettant de survivre, mais il n'a pu le faire que grâce au retard incroyable accumulé par Carrefour ou Auchan : ce sont eux qui auraient dû faire ce qu'a réussi Cdiscount.

Enfin, il y a l'ovni Amazon. Il mérite à lui seul quelques dizaines de posts... Ce qui est certain, c'est que l'on ne peut pas dire qu'Amazon ne sert à rien: il est juste en train de fixer de nouveaux standards dans plusieurs domaines, et notamment en matière d'excellence opérationnelle. Or comme on le sait, retail is detail…

mercredi 5 juin 2013

De la réelle performance des opérations marketing digital   

Les marques et les distributeurs lancent de plus en plus fréquemment des offres marketing sur Facebook, Groupon ou Foursquare. Elles sont souvent présentées comme de véritables réussites, mais de quel succès parle-t-on?

Un grand distributeur français a récemment proposé une réduction de 43% sur la plateforme de Groupon (pour du caviar), un autre a fait une opération flash sur internet pour de la lingerie et des maillots de bain à -50% sur deux jours, un cabinet de conseil de neurolinguistique propose des séances de conseil à 29€ au lieu de 225€ sur Groupon… La liste est longue et les résultats plutôt flatteurs.

Les marketeurs sont fiers de leurs résultats et plébiscitent les vertues de ces nouvelles pratiques "modernes". Mais si l'on testait les mêmes offres marketing sur un autre canal, cette emphase résisterait-elle ? Si l'on comparait une carte cadeau de 100 € vendue 50 euros sur Groupon et la même offre sur un dépliant publicitaire distribué à plusieurs millions d'exemplaires, qu’en serait-il ?

Les clients sont très doués pour identifier et exploiter toutes les formes de bonnes affaires que vous pouvez leur proposer. Autrement dit, ce n'est pas la forme dite moderne qui fait la performance de l'offre, mais bien le montant de la remise, l'avantage procuré. L’aubaine sera saisie par le consommateur, qu'elle se trouve sur Groupon, Facebook ou… en magasin !


Si l’objectif est de faire le buzz, de l’image ou de la notoriété, alors, oui ce type d’offre a tout son sens, mais par pitié, qu’on ne parle pas de nouvel eldorado du commerce et de révolution en action… C’est juste une remise de 50 %!

lundi 3 juin 2013

De quelle relation clients parlez-vous vraiment? 

Toutes les marques, toutes les enseignes expliquent à quel point la "relation clients" est importante pour elles. Toutes se rêvent en "marque relationnelle", "proche de ses clients", "orientées services", etc. Et curieusement, la plupart sont sincères.

Au-delà des mots, les postures relationnelles sont incroyablement variées. Quoi de commun entre 
  • la Fnac (relation clients exceptionnelle basée sur son programme d'adhésion, son image résiduelle de "love brand", ses passions partagées…), 
  • Darty (proche de ses clients par l'excellence de son service, y compris à domicile: le technicien Darty est l'une des personnes à qui vous laisseriez la clé de votre maison…) 
  • ou Boulanger (dont les valeurs internes, qui se ressentent réellement en magasin, sont "pro, simple, sympa") ?
Laquelle, de ces enseignes, peut revendiquer le "leadership relationnel" du secteur? Laquelle est le plus proche de ses clients ? Impossible de le dire sans préciser le sens des mots: que veut dire "être proche de ses clients" ou "avoir une relation clients privilégiée" ?
Cet exemple montre bien à quel point les déclarations incantatoires sur la "proximité" ou la "relation" doivent se prolonger par une analyse fine de la posture relationnelle et de ses traductions opérationnelles.

L'enjeu est comme toujours de prioriser les investissements pour maximiser le pay-back: les priorités de la Fnac, de Darty et de Boulanger sont forcément différentes. La Fnac joue massivement son programme d'adhésion, quand Darty forme ses livreurs et développe les services à domicile.

De manière simplifiée, on peut esquisser une typologie des postures relationnelles:
  • Plus de sympathie, d'empathie, de relation interpersonnelle = promesse relationnelle au sens "classique" du terme. Exemple: Boulanger, Jules
  • Plus d'identification à des valeurs, de communauté d'intérêt, d'appartenance = lien affectif à la marque. Exemple: Fnac, Abercrombie
  • Plus de praticité, de fluidité, de simplicité = promesse de réduction des efforts et de gain de temps. Exemple : Amazon, Chronodrive
  • Plus d'accompagnement, de services, de support, de coaching = promesse de prolongement de la relation au-delà de l'achat. Exemple: Darty, Picard

On a le droit de choisir une posture qui combine ces quatre composantes (même si c'est rarement une bonne idée!). Mais dans tous les cas, il faut définir de manière précise et non complaisante, la réalité de ce qu'on est, et l'effort qu'on est prêt à consentir pour aller plus loin dans les différents registres (allocation d'énergie, d'argent, de visibilité clients…). Ce n'est pas difficile à faire,  à condition d'utiliser les bonnes grilles de lecture, de ne pas être dupe des grands mots, et d'accepter certains renoncements !